vendredi 19 juin 2009

La Communauté du Spar de Wiers

Lorsque maman téléphone un dimanche matin, me sortant d’un sommeil profond, pour me demander de lui trouver deux tranches de fromage de chèvre et une bouteille de vin, la réaction est plutôt brutale. Au vu de l’urgence apparente de la situation (la crise du Chavrou serait-elle annoncée ?) et sous la pression de ma conscience de fils unique, je n’ai pas le cœur à refuser la requête. Il est 11h et je dois me rendre à l’évidence : la seule opportunité est le Spar de Wiers.

Le Spar de Wiers se situe entre le bunker irakien et les bâtiments communistes de l’ex U.R.S.S. Un cube étrangement grillagé qui ne laisse entrevoir que de faibles néons blancs sales, dont les horaires sont plus qu’approximatifs et l’enseigne brûlée par le temps. Mais surtout, c’est un centre social actif où les Wierois se rencontrent et retrouvent leurs racines villageoises. Le must du must de l’étude anthropologique. Après une nécessaire préparation psychologique, 3 Yakult et un antihistaminique, le départ est annoncé…


Bien évidemment, l’aventure commence par une pluie battante, histoire de mettre en place un contexte gris et sombre. Après quelques centaines de mètres, à pe
ine éveillé de ma première tasse de café, nous rencontrons une première embûche qui porte le doux nom de « WIERS KUISTAX ». Les rues du bourg prennent donc de faux airs de Blankenberg en novembre, croisés avec un semblant de tour de France où les policiers, parfois improvisés, se chargent de bloquer la circulation pour éviter tout accident malheureux. (Chaque année, en Belgique, 0,4 personne décède d’un accident de Kuistax). Depuis la voiture, on voit passer, trempés, les courageux coureurs dont on se demande si la drogue n’a pas bousillé trop de neurones…

Finalement arrivé à destination, on pénètre alors dans un lieu surmené de l’activité des acheteurs. La foule est bigarrée (et non « bien garée », ce qui n’est vraiment pas le cas). A partir de maintenant, tout peut arriver. Direction boucherie/charcuterie. Un ticket. L’attente, interminable.
-Pamela : Numero 29 !

-Simone :…
-Pamela : 29 !
-Simone : …
-Pamela : Personne le 29 ?
-Simone : …Han ! 29 ! A si, c’est moi…

Les tranches de pâté se découpent avec précaution, le jambon se tranche lentement, le boudin se découpe au millimètre près.

-Germaine : Ca va Pam ?
-Pamela : Oui hein, et toi ?
-Germaine : Bha ça va ! J'ai bien fait de faire mon barb' (comprendre barbecue) hier, hein! t'as vu le temps?
-Pamela: Han, ouais.
-Germaine: Et j'ai eu la réunion de parents, là
.
-Pamela : Han, ouais.

-Germaine : oui mais hé, j’en ai eu jusque 6h30, hein. Ce soir là on a mangé qu’il était passé 7h30. Mais après Yvon, il ne digère pas bien.
-Pamela : Han, ça…
-Germaine : Et il me faut aller chercher du Motilium, il n’en a plus !
-...

Et si on en parlait ? Si on prenait le temps de s’asseoir, ce dimanche matin, à 11h40, devant l’étalage de côtes de porcs, de saucisson de jambon et de salade de viande, pour discuter de nos problèmes digestifs ? Et comme pour mieux surenchérir :

-Pamela : Je te mets du salami à l’ail ?
-Germaine : mon dieu, non ! Parce que l’ail … ça me revient !

On assiste alors à la déconvenue de Daniel lorsqu’il drague en vain Pamela, aux engueulades sans fin des six enfants d’une famille nombreuse, à la toux racleuse et grasse des petits vieux enrhumés. C’est lorsqu’on arrive à la caisse qu’on commence à souffler en se disant que le plus dur est passé. Mais bien sûr :


-Charlotte : Mho, il n’a pas de prix sur les bas
-Yvette : Han ?
-Charlotte, inspectant la boite : Mais non…
-Yvette : Je ne sais pas moi… ils étaient là-bas, ainsi...

-Charlotte : MAAAARRTIIIIIIIIIIIINNNNEEE !! C’est combien les bas ?

11h57, les néons s’éteignent et plongent le magasin dans une torpeur effrayante. L’entrée est refusée aux pauvres affamés à la recherche d’une Carapils, d’un paquet de chips ou d’un bâton de berger. Prestement, je sors reprendre la pluie, comme un rite de purification.

On rentre chez soi des images plein la tête, des odeurs plein le nez. En regardant les nuages gris pleurer leur amertume, on imagine sans peine les âmes repues de victuailles, sortir de l’antre comme des zombies et laisser derrière eux une odeur de sueur, comme un parfum d’accompli. Et finalement, on se sent un peu plus proche de cette communauté sans nom, qui à
l’instar des chrétiens, profite du dimanche matin pour un moment de culte bien particulier… Amen !


vendredi 5 juin 2009

Ca n'arrive qu'à John...

Dans la série « ça n’arrive qu’à John »…

John a besoin de 4 vis. Des petits trucs de 30mm de long, environs 4g la vis, discrets…bref, John a besoin de pas grand-chose. C’est le temps de midi, envie de s’aérer les neurones après une réunion magistrale…et pourquoi ne pas aller au Brico ? Hein ? Franchement ?


John va donc au Brico pour acheter ses 4 misérables vis. Alors qu’il est perdu entre les bétonneuses (!) et le
s planches de WC, les lumières s’éteignent soudain et un bruit de ferraille retentit. Avant que les zombies de «Dawn of th Dead» ne débarquent, je me dirige calmement (avec un soupçon d’appréhension dans la mâchoire) vers les caisses. Les Bricosiens semblent tous suivre le chemin de la sortie parce que bon, on ne sait jamais…un Boeing d’Air France qui disparaît en pleine mer, Nadal éjecté de Roland Garros, le mot Geek dans le petit Larousse 2010…alors pourquoi pas un attentat au Brico de Ghlin?

Les caissières sont paniquées ! Le volet de sécurité vient brusquement de se fermer ! Seules les lumières de secours fonctionnent. Les Brico-Girls (Nadine, 52 ans ; Francette, 48 ans ; Annie, 46 ans et Jenny, 28, interim) se retrouvent sans scanner, sans caisse enregistreuse, sans ordinateur de bord, sans micro d’appel à l’aide
et…sans café! Les téléphones ne fonctionnent plus… Tout le monde se regarde et s’interroge…va-t-on mourir de faim? Va-t-on manquer la finale de la Nouvelle Star? Qui sera le premier à être mangé?

Après 15 minutes, une sorte de chef improvisé fini par hurler aux Bricosiens que nous fûmes alors (je précise qu’il ne s’agit cependant pas d’un incendie…) qu’un problème électrique a causé une surtension, que les circuits sont grillés et que le générateur de secours ne se met pas en marche. Nous attendons tous le passage où il nous explique comment sortir de l’enceinte, mais le bonhomme remercie déjà l’assemblée de sa patience et retourne finir son Twix.


Nous apprenons alors par Nadine que le monsieur ne veut pas ouvrir la grille manuellement car il a peur que nous nous enfuyons comme des voleurs avec 1 paquet de papier photo à 5eur, des lingettes synthétiques à 3,40eur, un tube de colle Pritt à 4,15eur ET…4 vis à 0,19eur la vis. Oh! L’ignoble! Penser ça de nous? Pauvres Bricosiens cadenassés entre les tondeuses à gazon et les fausses marguerites décoratives!

Après 15 min de négociation ferme, nous parvenons à convaincre bonhomme de nous laisser sortir par l’entrepôt à la condition unique de se voir visuellement fouillé avant le passage de la porte. Tels des otages en peine de libération, les gens filent en courant presque vers l’extérieur, heureux de revoir la lumière du jour. La prochaine fois, quand j’aurai envie d’acheter des vis, je piquerai du scotch au boulot, ca fera l’affaire!


Etre bloqué dans un Brico pendant une demi heure à cause d’une surtension électrique, il n’y a qu’à John que ça arrive…