lundi 28 décembre 2009

Et de Paris, il fallut revenir...

Il y a quelques semaines de cela, un heureux concours de circonstance nous permit de réserver un petit hôtel en banlieue parisienne, non loin du centre (en parisien, cela veut dire 45 minutes en transport en commun) et tous frais payés. Trop heureux de pouvoir admirer la capitale en ces temps d’obèses Pères Noël et de grasses tartiflettes, nous avons sauté sur l’occasion (sans la blesser)…ainsi que sur le premier TGV en partance de Lille. Mais voilà, d’aventures en aventures, les éléments vous font parfois payer le prix de votre chance.

C’est ainsi que le matin du départ, nous nous sommes levés avec la neige qui, ce jour-là, à cette heure-là, avait décidé de recouvrir la région d’un blanc manteau de 20cm. Et nous le savons tous, en Belgique, 20cm de neige, c’est ce que l’on appelle une catastrophe naturelle. Bref, notre courage à une main et la seconde vitesse de la voiture dans l’autre, nous bravâmes (n’est-ce pas !) l’élément poudreux jusque chez belle-maman et beau-papa. Car ce jour-là, c’est à eux que nous avions décidé de faire appelle (et confiance !) pour nous amener à la gare et prendre le départ. Mais beau-papa et belle-maman, c’est tout un roman…

N’oublions pas, d’abord, que je porte un respect total et une affection particulière pour ces personnes. Chez beau-papa, ce qui est beau, c’est l’insouciance de son regard et sa manière de parler de la dernière promo de chez Carrefour au milieu d’une conversation sur la guerre en Iran. Chez belle-maman, ce qui me plaît, c’est son caractère protecteur et sa vigilance en tout et pour tout. C’est ainsi qu’après de longs kilomètres à 30 à l’heure, nous arrivâmes au point de rendez-vous.

Comme on peut s’en douter, nous étions loin d’être en avance. Certains, même, auraient pu affirmer que nous étions en retard. Diable ! Perdus dans les ablutions solennelles de salutations familiales, nous ne voyons pas le brave beau-papa qui, soucieux de ses clients et de sa belle-mère, décida que le moment était approprié pour livrer deux bonnes tartes au sucre. John ne perd pas son sang froid et, très calmement, s’en va prévenir belle-maman que : " Beau-papa est parti sans nous, avec la voiture, est-ce normal?" Quelques cris et soupirs de désespoir plus tard, nous arrivons sur le quai et attrapons néanmoins nos wagons pour la France.

Malgré une arrivée avec une heure de retard, nous avons profité du court séjour comme il se doit. On a mangé de la tartiflette, un bretzel, des sandwiches bien gras, une crêpe au Nutella et des marrons chauds. Ca, c’était fait. Montmartre, Champs-Elysée, Saint-Germain, Saint-Sulpice, Saint-Foie-Gras et Place du saucisson…le séjour s’achevait déjà et la Gare du Nord nous accueillait de nouveau. Sans beaucoup de surprise mais avec un agacement certain, nous apprenons que notre TGV de retour aura 1h15 de retard. Armé de bouteilles de Sprite et de madeleines écrasées dans nos sacs, nous nous rongions les ongles dans un calme olympien… Cela ne faisait que commencer… Je vous le disais, 20cm de neige et le pays est en état de siège!

Finalement, notre TGV arriva avec plus d’1h30 de retard à Lille, ce qui nous fit manquer deux correspondances pour la gare de Tournai. Heureusement, beau-papa et belle-maman sont là. Ils sont donc prévenus du retard substantiel et informés de l’heure et du lieu exacts(je dis bien exacts!) de notre arrivée. Histoire de rendre l’attente plus douce, nous nous jetons sur le premier Buffalo Grill que nous croisons et dévorons, en 30min, un souper bien mérité. Sûrs de nous et déjà plus de 2h en retard sur notre retour prévu, nous montons dans le train, confiants en l’avenir… Mais à l’autre bout de la ligne, belle-maman et beau-papa avaient trouvé le repos du guerrier au fond de leur fauteuil douillet…

C’est ainsi qu’à notre arrivée, par acquis de conscience (et quel acquis !), Nous appelons belle-maman qui, dans un soupir entre songe et ronflement nous averti que beau-papa n’est pas encore parti…pire, même, il dort ! Exaspérés, nous ne pûmes que laisser échapper quelques grognements. Perdus face à la gare de Tournai, dans un froid de canard, avec nos bagages à nos pieds, en proie à tous les clodos du coin…le tableau ne nous amusa guère. Il fallait, encore, prendre notre mal en patience. Mais surtout… survivre !

Le temps passa, passa et passa encore. Et ainsi jusqu’à ce que beau-papa, décontenancé, fasse un dernier appel, l’ultime cerisette sur le gâteau déjà bien gros. Je vis alors le visage de mon brave compagnon d’infortune se ternir d’une étrange douleur et l’entendis prononcer en articulant exagérément et avec une fureur certaine : «TOURNAI papa, TOURNAI, T-O-U-R-N-A-I ! TOURNAI ! Pas Antoing, TOURNAI !». Hé oui, sur les conseils fort peu judicieux de belle-maman, beau-papa nous attendait (bravement, précisons-le) sur le quai d’une mauvaise gare…

C’est ainsi qu’il nous fallut 5h pour faire Paris-Wiers et que notre séjour s’acheva sur un sommeil bien mérité avec, pour ma part, une pensée attendrie pour mes beaux-parents qui, malgré une bonne volonté avérée, n’avaient pu vaincre les songes de Noël qui, entre neige et retard de train, les avaient emportés bien loin…




lundi 7 décembre 2009

Un petit pas pour l’humanité…

Mais un grand pas pour John! La semaine dernière fut riche en émotions et je me suis dit que j’avais suffisamment délaissé cet espace d’épanchement scriptural que pour m’y remettre de plus belle. Surtout que depuis la fois où j’ai percé mon premier trou dans un vrai mur avec une certaine émulation, c’est la plus grande avancée de ma vie… J’explique…

Il y a quelques semaines de cela, alors que je conduisais gentiment entre ici et là-bas, ma Clio m’assène, comme un coup de masse, un message tout aussi agressif que coercitif : «Réajuster le niveau d’huile !». J’avais entendu dire dans des histoires pour grandes personnes que, en effet, il y avait de l’huile quelque part dans les voitures et que parfois, il fallait en rajouter. Mais moi, innocent et naïf, je m’étais toujours dit que les légendes étaient belles et que cela n’arrivait qu’aux autres. Erreur ! En cette journée pluvieuse d’autoroutes, cela m’arrivait à moi ! «Pourquoi !?!», m’exclamai-je avec force et vigueur, «qu’ai-je donc fait pour mériter pareil châtiment ?», sanglotais-je alors. Je me repris rapidement car je suis quand même un homme (si !) et décidai de trouver une solution…

Je n’allais quand même pas me laisser faire de la sorte ! Réajuster le niveau d’huile ? Et puis quoi encore ? Repeindre des châssis ? Carreler une terrasse ? Tapisser ? Purger un radiateur ? Non, non et non. On commence par réajuster l’huile et on finit esclave du tourne-vis et de la scie circulaire. C’est pourquoi je décidais de nier ostensiblement les messages insistants de l’automobile qui ne cessa de me rappeler que ce foutu liquide de graissage venait à manquer. Je me portai très bien de ce déni manifeste jusqu’au jour où l’on me fit comprendre que je risquais la vie du véhicule…et surtout celle de mon compte en banque. Arf ! Penaud et résigné, je commençai à me faire à l’idée que j’allais devoir me salir les mains moi-même… il le fallait !

Je me mis donc à inspecter les encyclopédies, les sites Internet, les médiums et les témoins de Jehova mais tout cela ne me rassurait guère (particulièrement les Jehovas). A bout de nerfs et psychologiquement fragile, je me résolus à prendre la manuel d’instructions de la Clio : pages glacées, photos en couleur, paragraphes courts…tout devenait enfin possible ! Une grande respiration et la lecture commença… mieux qu’un Jules Vernes, je découvrais les mystères insondables de la mécanique automobile et les termes aussi farfelus que «bielle», «bavette», «injecteur» ou encore «piston». Tout cela me fit rêver à des mondes imaginaires où des centaines de Minipouces se cachent dans la machinerie et pédalent très très vite (surtout quand on va sur l’autoroute) pour mettre en œuvre l’incroyable engin et réajuste EUX-MÊMES l’huile de moteur quand elle vient à manquer !

Il fallut commencer par acheter l’huile. Je fis preuve de ruse, je l’avoue, et déléguai cette tâche à une tierce personne qui me satisfis grandement. Peu après la réception de la fabuleuse bouteille, le courage à son paroxysme, je compris qu’il était temps pour moi de réaliser l’acte. Et c’est ainsi que je soulevai le capot sans m’inquiéter des dépôts grisâtres qui se déposaient sur mes mains. Je sortis la jauge (ce qui me plus beaucoup, je dois l’avouer) que j’essuyai au moyen d’un vieux chiffon (comme conseillé dans le manuel) et que je replongeai dans je ne sais quoi et qui eut dû ressortir tout noir. Comme on put s’y attendre, le niveau d’huile était bas, très bas. Je m’empressai alors de vider le contenu de la bouteille dans un autre je ne sais quoi qui, par la logique des choses, devait être relativement identique au premier je ne sais quoi. Une fois fait, je m’assurai d’avoir tout rempli, rebouché, serré, fermé, essuyé. Mes mains dégoulinaient de bonheur et de bravoure, matérialisés par de jolis chamarrés de noir et de gris.

Quand je mis le contact (30 minutes après avoir réalisé l’appoint, c’est le manuel qui m’a obligé à subir cette insoutenable attente), ma voiture me remercia enfin : «Niveau d’huile correct». J’en eus la larme à l’œil et en poussant un soupir de soulagement, je me sentis grandis. J’avais fait un pas de plus dans le monde réel des vrais adultes. Ce fut un petit pas pour l’humanité…mais un grand pas pour John…

Ce que l’histoire ne dit pas, c’est que quand je me mis à verser l’huile dans son contenant, je m’empressai d’appeler le sauveur universel de toute situation problématique : papa !
- Papa, je suis en train de réajuster le niveau d’huile de ma voiture…
- QUOI ? MAIS ENFIN !? Pourquoi ne pas m’avoir appelé ? T’es fou ? Mais heuu…
- Papa, du calme. Je contrôle la situation…
- * silence de doute *
- Je me pose juste une question… j’ai un doute…
- …hummm ?
- Sur la jauge, l’huile est noire…mais dans la bouteille, elle est jaune…c’est normal ?
- …
- Papa ?
- …c’est parce que dans la bouteille, elle est propre…
- * silence de honte *

...ce fut un grand pas pour John… !


dimanche 29 novembre 2009

Chronique d'un valorisateur: mot compte triple

Un valorisateur, par définition, ça parle bien. Depuis la nuit des temps qui ont vu les valorisateurs naître (au moins 20 ans), l’art et la finesse du palabre est la panacée de mes semblables…pour certains plus que d’autres d’ailleurs. Je n’étais pas conscient de cette étonnante réalité jusqu’au jour où…

J’étais assis, fesses enfoncées dans le velours de mon siège, à écouter un homme avec un gros ventre, des lunettes au bout du nez et une cravate extravagante aux motifs de cartes à jouer des années 60. Il articulait exagérément, comme s’il parlait à une assemblée de manchot maltais et en espérant se faire comprendre. Quand soudain, après un soupir de désespoir, il lança dans l’assemblée : « Si cette réalité vous semble absconse, elle n’en reste pas moins ubuesque ». Mon esprit explosa d’un Waw ! d’admiration.

Je devins donc plus qu’attentif aux expressions alambiquées qui se tramaient, toujours impromptues, lors de divers meeting. Je pus, ainsi, entendre : « Me voilà donc mari de tant d’indigence ! » ou encore « notre discussion ne me semble pas féconde du point de vue intellectuelle » et même « Il faut que nous passions au bleu le neting de la ligne de précompte afin d’éviter le marasme ». Mes yeux brillaient de stupeurs alors que mon stylo, frénétique, ne manquait pas une occasion de mettre sur papier ces perles rares de jonglerie linguistique.


Le pire, c’est quand ils commencent à parler latin ! « Mais voyez-vous, in extenso, cela me semble impossible ! » ; « Nous entrons dans un véritable casus belli » ; « Il a pris cette décision ex-officio, ce qui est intolérable ! » et même « Nous devons réaliser les portraits intuitu personnae ». Moi qui n’étais déjà pas doué en version, je me prends à lancer des « c’est pas faux » qui m’échappent quelque peu…


Ceci dit, parfois, les valorisateurs se lâchent ! Ils se mettent à « bananer » à user des « esperluettes » ou encore à se lever « dès potron minet », ce que je trouve très drôle, pardonnez m’en. Parfois, aussi, je me laisse entendre des phrases dont le sens ne manque pas de m’échapper : « ce n’est pas un cas où tout le monde se mord la queue et inversement, voyons ! » ( ???) ; « Les chefs fatigués sont fatiguant ! » ; « Chez nous, c’est la lasagne mais en plus congelé… ».



Entre alors ces hommes et femmes de bonne volonté qui, malgré eux, sont dotés d’une intelligence supérieure et se doivent, en dépit de leurs interlocuteurs limités, d’utiliser le mot juste. J’ai donc vu se perdre des « palanquée », « saumâtre », « ingénierie collaborative », « technocratique » et autre « polysémie » (qui n’est pas un groupe d’îles paradisiaques).
Mais la palme en revient à ce brave homme qui devant un auditoire de 250 personnes s’est permis d’évoquer son passé d’adolescent en ces termes : « Je faisais preuve, il faut l’avouer, d’une sorte d’indiscipline rabique ». Et ma voisine, de se pencher vers moi : « Tiens, il est juif et il n’aime pas les rabbins ! »…et moi…de la croire… *honteux*

Je m’en vais donc proposer, pour le repas de mon service, un scrabble majestueux où chacun pourra jouer de son extraordinaire habileté et tenter le tant convoité « mot compte triple » du valorisateur. Et comme le dirais ma chef: « Que ne sera-ce, mes amis ! »…oui, que ne sera-ce… ?

jeudi 17 septembre 2009

Funérailles matrimoniales

Il y a quelques temps, j’assistais pour la première fois à un évènement des plus particuliers. On l’appelle enterrement de vie de garçon/jeune fille ou encore brûlage de pantalon/culotte. Force est de constater que personne n’est enterré (ce qui aurait pu être drôle), ni brûlé (ce qui aurait pu être encore plus drôle) et que les pantalons et les culottes demeurent (presque) intactes…

En fait, un « brûlage » (apparemment, c’est fashion de l’appeler comme ça et puis, on utiliserait « enterrement » que ça ne ferait carrément pas le même effet), c’est une sorte de baptême estudiantin amélioré pour deux personnes qui ont eu la mauvaise idée de vouloir se marier et qui semblent devoir être punies pour ce choix. Voyons cela de plus près…

Pour un brûlage réussi, il faut une bande de mâles hétéro et bruts, d’un poids moyen de 90Kg chacun, avec de vrais poils au menton ; une bande de copines hyper apprêtées qui n’aiment pas la bière ; 10 casiers de bière ( !) ; des pains et des saucisses (pour faire ce qu’on appelle des « pains-saucisses ») ; un tas d’accessoires douteux dont le but encore inavoué laisse présager le pire et, enfin, deux victimes (que l’on appelle aussi « futurs mariés »), innocentes et candides, que le bûcher du ridicule attend de voir flamber.

Après un accueil somme toute encourageant, les victimes s’aperçoivent rapidement que l’objectif des prochaines heures sera de les rendre aussi grotesques que possible. A ce que j’ai pu en saisir, une règle majeure est de séparer, au moins pour un temps, les hommes (les vrais !), des femmes. Ceci laissera l’opportunité aux mâles d’exprimer tout leur relent de testostérone et aux femmes de profiter d’un moment de calme et de sérénité. Les canines luisantes des bourreaux aiguisées, le spectacle peut commencer.

Ma condition biologique m’y contraignant, j’ai donc assisté à la partie « mâle » de l’aventure. Telle une horde de Wisigoths en manque de combat, le groupe de potes s’attaque au relooking du fiancé. Un string par ci, une jupe par là, un fabuleux corset et une touche de maquillage et le voilà biseauté pour un quartier mal famé de la gare du Nord. Les Wisigoths n’étant pas abonnés à Vogue, ils complètent le tableau d’un fabuleux tablier orné d’un énorme sexe poilu. Finesse et subtilité.

Les capsules s’éclipsent, les bouteilles s’entrechoquent de vide. Soudain, un homme d’un autre âge (que l’on appellera plus tard « l’homme à abattre ») que nous nommerons Robert s’approche de moi. Chasseur accompli, homo érectile, maître de toutes connaissances, seigneur de la bonne manière et de la bien séance. Robert aime : tuer les animaux, les chiens qui aiment tuer les animaux (les autres), les hommes qui aiment tuer les animaux (mais pas les chiens). Le brave bougre se met dès lors à m’expliquer comment prendre des photos. Quand d’un coup, au milieu de deux mots, un renvoi atroce vient s’écraser sur mon visage. Robert est un vrai, il rote, il pète et ce n’est sûrement pas moi qui pourrai l’arrêter.

Après quelques heures d’amusement fantasques et de ridicule, les braves se rejoignent pour un fabuleux barbecue en musique. L’ambiance se détend et les victimes, finalement épargnées, retrouvent un état correct. Les saucisses grillées rejoignent les pains, la bière enivre de plus belle. Bien vite, je me suis rendu compte que mes amis Vodka et Martini allaient m’aider à prendre place dans l’ambiance. Un petit lancé d’œufs, une déclaration d’amour la bouche pleine de marshmallow, une culotte sale et du Nutella sur les orteils, voilà la toile d’une soirée sans queue ni tête…voire, juste sans tête… qui se terminera, pour moi, dans quelques discours philosophico-éthyliques avant un coma profond et reposant.

Après ces heures de sommeil, force est d’admettre que l’évènement n’est pas si traumatisant. Ce qui m’apparaissait comme un remake de « Il faut sauver le soldat Ryan » n’était en fait qu’un délire estudiantin gentillet, inattendu mais profondément bon enfant. Lorsque Robert débarqua en notre logis, un chevreuil mort dans sa remorque, à 7h tapante, il me sembla juste de le désigner « l’homme à abattre ». Entre deux songes, je me pris à bafouiller : « L’Egypte avait ses sept plaies, ce village à Robert ! ».

J’avoue avoir revu les photos avec un plaisir certain. Et c’est probablement les sourires des futurs mariés qui’ m’ont fait reconsidérer cette improbable journée de funérailles matrimoniales. Je garde néanmoins un doute : les vies de jeune homme et de jeune fille ont-elles vraiment été…enterrées ?


vendredi 11 septembre 2009

Laissez moi jouer ma vie…

…j’ai un sacré rôle dedans !

Ne pas publier d’article sur son blog est une ignominie sans nom. Plus de deux mois de mort dans l’âtre, sous l’excuse volubile d’un été vacancier, c’en est trop ! Personne ne se plaint (ni ne se vide, d’ailleurs), ce qui est d’autant plus inadmissible. Qu’à cela ne tienne, je me mets au résumé éclair des 72 jours écoulés depuis la dernière publication. Flash éclair, attention les yeux, ça va aller très vite :

L’Avare, barbecues, Forges-Phillipes, Scrabble, brûlage de culotte, Alsace, Bellewaerde, cousine, 40 ans de Régis, mexicain, Avatar, notaire, Chimay, mariage, coiffeur, cathou, photo, Harry Potter, 30 ans de mariage, Marmotton, Sabine, sauvetage, Concert de Zoé, Chicha, couque suisse, appartement, agence immobilière, Onirys, Famille Margerin, papillon des étoiles, jeanne, communication, oublie de portefeuille, valorisation, porte de douche, architecte, Three to Tango, site web, UMONS, chemise, funérailles, pricing, paella.

Vous avez suivi ? Non ? Tant pis.

J’ai entendu ce matin une interview du père de Yanina Wickmayer qui disait : « Il ne faut pas courir plus loin que ses chaussures ». Ainsi soit-il ! Cependant, je me trouve trop souvent loin de mes chaussures qui, tant mal que mal, essaye de me rattraper, en vain.

On m’a dit dernièrement : « Vivre à du 200 à l’heure est un art qui, comme toute forme d’art, fini par s’essouffler ». Bien que cela ne me rassure pas, je vois dans ce train de vie un peu fou l’occasion de carpediemiser à mort, de mordre la vie à pleine dent, sans remord ni regret. Voir ces personnes qui font de ma vie un paradis, qui dessinent mes sourires et tracent un peu de ma route, voilà une raison excellente d’avoir mis de côté, quelques temps seulement, ce petit caveau à pensées qu’est ce blog.

Le 20 août dernier, un concours de circonstance m’a ramené chez moi plus tôt que prévu. Devant moi, une BMW prenant un tournant en trombe se mit à tournicoter devant mes yeux avant de s’immobiliser sur son flanc. Ma voiture stoppée devant l’accident, j’ai vécu les 4 secondes les plus longues de ma vie. Un instant précis où l’on se demande si l’on sera lâche ou courageux. 4 longues, infinies secondes durant lesquelles on se sent capable du meilleur comme du pire. L’histoire se finira bien, sans gravité extrême, que des cœurs qui ont battu bien fort et des larmes qui ont coulé bien vite…

C’est sans doute l’évènement le plus marquant de ces 72 jours écoulés. Un bref instant, 30 minutes de ma vie peut-être, mais qui font voir les choses autrement. On se pose, on s’évapore un peu. On se demande, on s’interroge. Et pourquoi ? Et comment ? Et si… ? Au final, on regarde le ciel, un ciel d’été trempé du crépuscule. On laisse se dilater ses pupilles pour mieux s’imprégner du céleste agonisant. Et on se dit, on se répète, que la vie, pleine de surprise, offre quand même quelque répit magique et doux.

Dans ces quelques lignes brumeuses, je reprends les commandes de la plume et le goût d’écrire à tout vent, à tout va. Je passerais bien, avec fougue et passion, la porte de l’inclination et du serment…mais…n’oubliez pas…vous d’abord !

mercredi 1 juillet 2009

Mylèèèèèèèèèèèèèèèèène!

Lorsqu’on achète des billets de concert un an avant l’évènement, on a de quoi se réjouir de l’arrivée de la date fatidique. On compte les jours sur le calendrier de la cuisine, on sort tous les CD’s de l’artiste, on étudie les paroles et on se demande quel t-shirt on va mettre (si on est gay). Mais lorsque l’artiste est Mylène Farmer, le concert est bien plus qu’un évènement musical. C’est un périple semé d’embuches, une expédition qui ne s’improvise pas…

Quand on va voir Mylène en concert (oui, je l’appelle Mylène, c’est entre nous…), un fan, un vrai, se doit de prendre un billet en fosse. Et si le mot «fosse» s’associe facilement au mot «lions» ce n’est pas sans raison. Pour avoir la chance de pénétrer sur la vaste plaine du combat et de voir l’artiste plus grande qu’une mangouste moldave (c’est pas très grand), il faut se lever tôt, très tôt. C’est ainsi que les plus acharnés planteront leurs bivouacs la nuit précédent l’apparition de la belle. Personnellement, me plaçant dans la catégorie «fan mais faut pas trop déconner non plus», j’ai choisi d’arriver à 15h sur les lieux du futur presque-crime soit, 6h avant le concert. Armé de sandwiches, boissons, lecteur MP3, Tetris de poche et autre mots croisés, je me sentais fin prêt pour l’interminable attente.

Un concert de Mylène Farmer draine des centaines, des milliers de gays. En arrivant sur place, on remarque vite la démographie particulière de 27 gays au mètre carré, ce qui, sans être dramatique, est quand même beaucoup. Vous avez effectivement 1 chance sur 10 de rencontrer un homo dans la rue. Lors d’un concert de la rousse, vous avez les mêmes chances de croiser un hétéro. Le gay-fan-de-Mylène est très organisé. Il amène sa couverture (parce que les graviers abîment les fesses), son thermos de soupe brûle-graisse, ses boissons énergisantes et son dernier magazine Têtu. Il a mis 3 jours pour décider de ce qu’il allait porter et continue d’angoisser à l’idée d’atterrir sur la scène. Il est 15h15, c’est le moment le plus dur, celui où l’on se dit : « Ah…plus que 6 petites heures … »

Bien vite, on entame la discussion avec nos compagnons de file (qui seront gays, d’ailleurs) en attendant le moindre mouvement. Après 3 heures d’attente, le mouvement a lieu ! Les portes de la salle se sont ouvertes. Le gay-fan-de-Mylène se lève prestement, s’époussette (c’est important) et se recoiffe. Un coup de déo, on replie soigneusement la couverture et, enfin, on s’épanche d’un début d’hystérie collective. Ensuite, c’est un jeu d’enfant : un pas toutes les 10 ou 15 minutes, des sorteurs qui se demandent ce que cette bande de folles fait là, un cri par-ci, un évanouissement par là… la routine.

Quand le gay-fan-de-Mylène arrive devant l’entrée de la salle de concert, il se met à piétiner comme un labrador devant une croquette de bœuf. Dès que son ticket est déchiré, il vérifie que le vilain gars de l’accueil n’a pas complètement défiguré ce qui deviendra un objet de collection. Et là, il court. Court! Court, fan-gay-de-Mylène! Il s’enfonce dans le bâtiment dans un hurlement de plaisir intense, les bras en l’air. «Mylèèèèèèèèèèèèèèène!». Non, pas encore.

Lorsqu’on connaît le terrain de la fosse, on sait que les 2 heures qui précèdent le concert sont cruciales. Une fois sur place, il ne faut pas s’asseoir sous peine d’être sauvagement piétiné par des semelles compensées. Interdiction de quitter sa place pour aller aux toilettes : si tu pars…tu ne reviens pas! Les gens chantent, sifflent, scandent…bref, ils passent le temps comme ils peuvent. A 21h27, le miracle à lieu…les lumières s’éteignent…

Bien vite, on gagne 3 ou 4 mètres d’avancée suite aux évanouissements en masse du premier rang. Là, le temps s’arrête. Le spectacle est grandiose, l’ambiance est folle (!). Le gay-fan-de-Mylène atteint le nirvana, la transe ultime. On danse, on chante, on hurle. Parfois, j’avoue, on a un peu envie de gueuler au public : «laissez-la chanter bordel ». On remarque les motivés du premier rang à la recherche du moindre postillon perdu. Mais dans la liesse suante (mais d’une sueur propre, s’il vous plaît!), on oublie vite les fausses notes de ses voisins, la pression de la foule sur les omoplates, les six heures d’attente et le prix des tickets… C’est beau, c’est bon, c’est grand, c’est waw…

La fin du spectacle sonne, la diva quitte la scène et le public verse de nombreuses larmes. La gay-fan-de-Mylène, manifestement ému, est obligé de quitter les lieux, la mort dans l’âme…non sans se jeter sur les centaines d’articles estampillés «MF», histoire de noyer leur chagrin dans le badge Mylène, dans le parapluie Mylène, dans le pendentif Mylène…ou…dans le gode Mylène. Oui, il faut croire que Mylène connait ses fans…

Avec le sourire aux lobes, on rejoint son chez soi en fredonnant ce qui ressemble à de vieilles comptines. On a dans le cœur une étrange mélancolie, celle qui vous rappelle que c’est déjà fini. Et puis, on se sent comme un gosse, fier et heureux d’avoir pu toucher son idole du regard. Au fond, il doit y avoir en moi une part de gay-fan-de-Mylène qui contribue à rendre ces moments magiques et inoubliables.

vendredi 19 juin 2009

La Communauté du Spar de Wiers

Lorsque maman téléphone un dimanche matin, me sortant d’un sommeil profond, pour me demander de lui trouver deux tranches de fromage de chèvre et une bouteille de vin, la réaction est plutôt brutale. Au vu de l’urgence apparente de la situation (la crise du Chavrou serait-elle annoncée ?) et sous la pression de ma conscience de fils unique, je n’ai pas le cœur à refuser la requête. Il est 11h et je dois me rendre à l’évidence : la seule opportunité est le Spar de Wiers.

Le Spar de Wiers se situe entre le bunker irakien et les bâtiments communistes de l’ex U.R.S.S. Un cube étrangement grillagé qui ne laisse entrevoir que de faibles néons blancs sales, dont les horaires sont plus qu’approximatifs et l’enseigne brûlée par le temps. Mais surtout, c’est un centre social actif où les Wierois se rencontrent et retrouvent leurs racines villageoises. Le must du must de l’étude anthropologique. Après une nécessaire préparation psychologique, 3 Yakult et un antihistaminique, le départ est annoncé…


Bien évidemment, l’aventure commence par une pluie battante, histoire de mettre en place un contexte gris et sombre. Après quelques centaines de mètres, à pe
ine éveillé de ma première tasse de café, nous rencontrons une première embûche qui porte le doux nom de « WIERS KUISTAX ». Les rues du bourg prennent donc de faux airs de Blankenberg en novembre, croisés avec un semblant de tour de France où les policiers, parfois improvisés, se chargent de bloquer la circulation pour éviter tout accident malheureux. (Chaque année, en Belgique, 0,4 personne décède d’un accident de Kuistax). Depuis la voiture, on voit passer, trempés, les courageux coureurs dont on se demande si la drogue n’a pas bousillé trop de neurones…

Finalement arrivé à destination, on pénètre alors dans un lieu surmené de l’activité des acheteurs. La foule est bigarrée (et non « bien garée », ce qui n’est vraiment pas le cas). A partir de maintenant, tout peut arriver. Direction boucherie/charcuterie. Un ticket. L’attente, interminable.
-Pamela : Numero 29 !

-Simone :…
-Pamela : 29 !
-Simone : …
-Pamela : Personne le 29 ?
-Simone : …Han ! 29 ! A si, c’est moi…

Les tranches de pâté se découpent avec précaution, le jambon se tranche lentement, le boudin se découpe au millimètre près.

-Germaine : Ca va Pam ?
-Pamela : Oui hein, et toi ?
-Germaine : Bha ça va ! J'ai bien fait de faire mon barb' (comprendre barbecue) hier, hein! t'as vu le temps?
-Pamela: Han, ouais.
-Germaine: Et j'ai eu la réunion de parents, là
.
-Pamela : Han, ouais.

-Germaine : oui mais hé, j’en ai eu jusque 6h30, hein. Ce soir là on a mangé qu’il était passé 7h30. Mais après Yvon, il ne digère pas bien.
-Pamela : Han, ça…
-Germaine : Et il me faut aller chercher du Motilium, il n’en a plus !
-...

Et si on en parlait ? Si on prenait le temps de s’asseoir, ce dimanche matin, à 11h40, devant l’étalage de côtes de porcs, de saucisson de jambon et de salade de viande, pour discuter de nos problèmes digestifs ? Et comme pour mieux surenchérir :

-Pamela : Je te mets du salami à l’ail ?
-Germaine : mon dieu, non ! Parce que l’ail … ça me revient !

On assiste alors à la déconvenue de Daniel lorsqu’il drague en vain Pamela, aux engueulades sans fin des six enfants d’une famille nombreuse, à la toux racleuse et grasse des petits vieux enrhumés. C’est lorsqu’on arrive à la caisse qu’on commence à souffler en se disant que le plus dur est passé. Mais bien sûr :


-Charlotte : Mho, il n’a pas de prix sur les bas
-Yvette : Han ?
-Charlotte, inspectant la boite : Mais non…
-Yvette : Je ne sais pas moi… ils étaient là-bas, ainsi...

-Charlotte : MAAAARRTIIIIIIIIIIIINNNNEEE !! C’est combien les bas ?

11h57, les néons s’éteignent et plongent le magasin dans une torpeur effrayante. L’entrée est refusée aux pauvres affamés à la recherche d’une Carapils, d’un paquet de chips ou d’un bâton de berger. Prestement, je sors reprendre la pluie, comme un rite de purification.

On rentre chez soi des images plein la tête, des odeurs plein le nez. En regardant les nuages gris pleurer leur amertume, on imagine sans peine les âmes repues de victuailles, sortir de l’antre comme des zombies et laisser derrière eux une odeur de sueur, comme un parfum d’accompli. Et finalement, on se sent un peu plus proche de cette communauté sans nom, qui à
l’instar des chrétiens, profite du dimanche matin pour un moment de culte bien particulier… Amen !


vendredi 5 juin 2009

Ca n'arrive qu'à John...

Dans la série « ça n’arrive qu’à John »…

John a besoin de 4 vis. Des petits trucs de 30mm de long, environs 4g la vis, discrets…bref, John a besoin de pas grand-chose. C’est le temps de midi, envie de s’aérer les neurones après une réunion magistrale…et pourquoi ne pas aller au Brico ? Hein ? Franchement ?


John va donc au Brico pour acheter ses 4 misérables vis. Alors qu’il est perdu entre les bétonneuses (!) et le
s planches de WC, les lumières s’éteignent soudain et un bruit de ferraille retentit. Avant que les zombies de «Dawn of th Dead» ne débarquent, je me dirige calmement (avec un soupçon d’appréhension dans la mâchoire) vers les caisses. Les Bricosiens semblent tous suivre le chemin de la sortie parce que bon, on ne sait jamais…un Boeing d’Air France qui disparaît en pleine mer, Nadal éjecté de Roland Garros, le mot Geek dans le petit Larousse 2010…alors pourquoi pas un attentat au Brico de Ghlin?

Les caissières sont paniquées ! Le volet de sécurité vient brusquement de se fermer ! Seules les lumières de secours fonctionnent. Les Brico-Girls (Nadine, 52 ans ; Francette, 48 ans ; Annie, 46 ans et Jenny, 28, interim) se retrouvent sans scanner, sans caisse enregistreuse, sans ordinateur de bord, sans micro d’appel à l’aide
et…sans café! Les téléphones ne fonctionnent plus… Tout le monde se regarde et s’interroge…va-t-on mourir de faim? Va-t-on manquer la finale de la Nouvelle Star? Qui sera le premier à être mangé?

Après 15 minutes, une sorte de chef improvisé fini par hurler aux Bricosiens que nous fûmes alors (je précise qu’il ne s’agit cependant pas d’un incendie…) qu’un problème électrique a causé une surtension, que les circuits sont grillés et que le générateur de secours ne se met pas en marche. Nous attendons tous le passage où il nous explique comment sortir de l’enceinte, mais le bonhomme remercie déjà l’assemblée de sa patience et retourne finir son Twix.


Nous apprenons alors par Nadine que le monsieur ne veut pas ouvrir la grille manuellement car il a peur que nous nous enfuyons comme des voleurs avec 1 paquet de papier photo à 5eur, des lingettes synthétiques à 3,40eur, un tube de colle Pritt à 4,15eur ET…4 vis à 0,19eur la vis. Oh! L’ignoble! Penser ça de nous? Pauvres Bricosiens cadenassés entre les tondeuses à gazon et les fausses marguerites décoratives!

Après 15 min de négociation ferme, nous parvenons à convaincre bonhomme de nous laisser sortir par l’entrepôt à la condition unique de se voir visuellement fouillé avant le passage de la porte. Tels des otages en peine de libération, les gens filent en courant presque vers l’extérieur, heureux de revoir la lumière du jour. La prochaine fois, quand j’aurai envie d’acheter des vis, je piquerai du scotch au boulot, ca fera l’affaire!


Etre bloqué dans un Brico pendant une demi heure à cause d’une surtension électrique, il n’y a qu’à John que ça arrive…


samedi 30 mai 2009

Zakynthos en 10 leçons...

Un voyage de sept jours dans une île grecque paradisiaque, ça vaut bien un petit article ! Plutôt que de vous décrire mes activités journalières à la mode « Martine en Grèce » ou de chanter les louanges du sable fin et de l’eau bleue, j’ai choisi de vous apprendre Zakynthos en 10 leçons. 4, 3, 2, 1, pastèque !

1. De l’île de Zakynthos

Le premier choc est à l’atterrissage : jusqu’au dernier moment, on n’est pas sûr de se poser sur le plancher des vaches…où devrais-je dire, le plancher des brebis ! On remarque rapidement l’azure de l’eau et dès la sortie de l’avion, on comprend pourquoi on n’a mis dans sa valise que des t-shirt et des shorts. C’est joli, c’est mignon, c’est dépaysant. Bref, ça a le goût des vacances et ça, c’est bien.

2. De la langue grecque

Au début, on pense que c’est de l’espagnol. Puis, on comprend vite que les borborygmes linguistiques ne sont autres que la version moderne du grec. Bénis soient ceux qui, dans leur prime jeunesse jésuite, ont eut la bonne idée de choisir l’option grecque : la lecture des panneaux, indications et autres informations n’en sera que plus facile. Moi, j’ai eu l’impression de voir partout la police de caractère « symbol » de Windows ! Après quelques jours, on assimile « Calimera », « Calispera », « Efahisto » et « Parakalo » : dans l’ordre, bonjour, bonsoir, merci, de rien. De quoi vivre 7 jours d’impeccable politesse.

3. De l’hôtel

Les hôtels ont tous des noms de rêves éveillés : Alexandra Beach, Iberostar Resort, Paradise Beach…nous, on a fait sobre : Tsamis Zante hôtel. Après un trajet périlleux en autocar (pas en bus hein, en AU-TO-CAR !), le petit bâtiment s’impose au milieu des oliviers. Accueil sourire, piscine et vue sur mer. Déjà, les odeurs de cuisine nous chatouillent les narines. Transat’ à gogo et cocktails en perspective… Mais chose étrange…on nous accueille en allemand !

4. Des allemands

Zakytnhos, si elle n’avait été grecque, aurait à coup sûr été allemande ! Si le dépaysement par le lieu était total, celui de la langue le fut un peu moins. Achtung ! Ils z’ont les moyens de fous faire parler ! Ils sont là, là et là aussi. Ils sont partout. Un allemand, ça parle fort, c’est gros et très laid mais aussi attendrissant car il n’en peut rien. Un allemand est chez lui partout où il pose ses valises. Si le buffet ouvre à 12h30, l’allemand est là à 12h29 ! L’allemand ne parle que l’allemand et, selon les rumeurs, il pisse aux quatre coins de l’hôtel à son arrivée, histoire de s’approprier le territoire. Nous avons décidé de rester dissidents et n’avons entonné que de bref « Angeführt ! 4 ! Encore ? » que les fans de Murielle Robin sauront reconnaitre.

5. Du bracelet jaune

A l’arrivée à l’hôtel, on vous explique les choses primordiales : où se trouve le buffet, à quelle heure on mange, où se trouve la piscine, le numéro de votre chambre et les jours où l’on sert de la choucroute (cfr. Point 4 !). On vous donne alors votre clé, la télécommande de la télé, celle de l’air co et…un bracelet jaune ! A l’instar de la cordelette orange (voir article du 11 mai), le petit bout de plastique attaché à votre poignet vous donne droit au sacrosaint et formidable « All in ». Le All In, c’est un concept génial. Ca veut dire que dans le prix, tout est compris sauf ce qui n’est pas compris. Vous avez de la sorte accès à une liste restreinte de choses que vous pouvez avoir à volonté. Avec le bracelet, vous pouvez boire de la bière dans des petits verres, manger de la fêta et des tomates, avoir du jus d’orange le matin et même boire un Daïquiri. Par contre, cela ne vous donne pas droit au cappuccino (mais bien au café frappé crème), au Martini, aux hot-dogs ou au jacuzzi. Note importante : une fois bouclé, le bracelet jaune ne s’enlève pas ! JAMAIS ! SOUS AUCUN PRETEXTE ! D’ailleurs, le seul moyen de l’enlever, c’est de le couper avec les dents. Vous comprendrez mieux pourquoi, sur les photos de vacances, tous les gens ont l’air de revenir de Werchter ou du Festival de Dour avec leurs petits bracelets colorés au poignet.

6. Des routes…

Quand on loue une Kia Picanto bleue à Zakynthos, on ne sait pas qu’il s’agit du début d’une épopée rallye. La carte fournie semble très aérée et pour cause, les auteurs préfèrent ne pas décourager l’intrépide conducteur. En même temps, conduire sur l’île est plutôt facile. La priorité de droite n’existe pas plus que celle de gauche. Se garer ? Pff ! Facile ! On s’arrête comme on veut, quand on veut, où on veut. La seule règle est d’enclencher les feux de détresse qu’on appelle là-bas les balises du tout-permis puisque, une fois allumées, tout est permis ! Les « grands axes » sont des routes de campagnes et les « routes secondaires » sont des sentiers ruraux. Les pentes à 10% se succèdent et la Picanto a parfois bien du mal à gravir les collines. Pas de panneau pour vous rappeler les limitations de vitesse puisque, d’évidence, l’état des routes ne permet à personne les excès. Ceci dit, le trajet aux airs de safari kenyan vous offre des vues imprenables de l’île sauvage et vous concède ainsi des souvenirs uniques entre l’angoisse des ravins et la crainte de la panne au milieu de nulle part.

7. Des villes de l’île

Le grec, c’est compliqué. Les noms de leurs villes, encore plus. Dès lors, on est contraint de trouver des moyens mnémotechniques pour se comprendre plus facilement. « Tsilivi » devient « Guili-Guili » ; « Gerakari » devient « Gare-au-gorille » et « Porto Vromi » devient « Porto Vômi » (mais ça, c’est seulement parce que c’est drôle !). Une ville à Zakynthos, c’est en fait une grande et longue rue bordée de restaurants, d’hôtels, de « super market » qui ressemblent à des superettes, de taxi, de voitures à louer et de shops-arnaque qui vendent des tortues en peluche, des essuies de plage et des portefeuilles. Et même que la nuit, c’est beau, ça brille et ça grouille de gens en tongs et en casquette qui sourient béatement devant les enseignes lumineuses multicolores.


8. De l’honnêteté grecque

Je ne peux m’empêcher de parler de l’honnêteté de nos amis helléniques. Pour mieux illustrer cette réalité, je me contenterai de cette adorable histoire. Une fois mes lunettes de soleils écrasées au sol une dizaine de fois, les verres explosés et la monture pliée, il me fallait une nouvelle paire de binocle. Direction shop-arnaque de Guili-Guili ! Là, on trouve des dizaines et des dizaines de lunettes de toutes formes, couleurs et marques. J’essaye les montures jusqu’à trouver celles qui me rendent le moins ridicule et me dirige vers le comptoir pour régler le vendeur. Je dépose les lunettes qui arborent deux crocodiles et la marque « LACOSTE » près de la caisse enregistreuse et sort de mon portefeuille le compte juste : un billet de 5 euros. L’homme au sourire attendrissant glisse les lunettes dans un petit étui et prend la peine de me préciser : « Ce ne sont pas des vraies, vous savez ! ». Han ! Surprise ! Tant pis, je les ai achetées quand même, les fausses Lacoste…

9. De la croisière obligatoire

Quand on visite Zakynthos, on ne peut décemment par repartir sans avoir participé à une croisière d’une journée pour faire le tour de l’île. Ce jour-là, il faut se lever tôt et parcourir la route jusqu’au port de la grande ville pour embarquer dans le bateau. Celui-là même qu’on vous a décrit comme le summum de la modernité et du confort, le must du best of de tous les bateaux qui proposent exactement le même trajet sur l’île. On vous promet également que vous verrez des dauphins, des tortues, des baleines blanches, des kangourous et si vous avez de la chance, un tyrannosaure! Accompagné par un CD 6 chansons jouées en boucle, vous terminez sur des bancs en bois mal cloués avec pour compagnie la fumée des moteurs dans les narines. Soyons cependant honnêtes, l’excursion est sublime, le vent chaud agréable et les points de vue à couper le souffle. Après une journée de navigation, le retour à la terre ferme est apparemment attendu par beaucoup : les gens (les allemands ?) se ruent en effet vers la sortie, comme s’ils voula ient tous vomir en même temps et s’entassent en se bousculant, histoire d’être le premier dehors. Nous en avons conclu que c’était probablement le jour de la choucroute et qu’ils ne voulaient pas manquer une seule saucisse.

10. Des vacances reposantes

Zakynthos, c’est vraiment se donner l’occasion d’un repos mérité. Le soleil qui vous dore l’épiderme, les légumes frais du buffet, l’air iodé d’une mer que vous ne vous lassez pas d’admirer. Les désagréments n’en sont pas vraiment et le voyage en vaut vraiment la peine. On rit, on se moque mais toujours gentiment (encore que…). On se prélasse, on se délasse, on se relaxe. Et le jour du départ, bien que content de retrouver le sol belgo-belge et notre petit chez nous, on quitte le bout de paradis avec un petit goût amer, une larmouillette à l’œil et l’envie de déjà penser à la prochaine destination qui transformera nos idées noires en marshmallow et nos tristes pensées en barbe à papa.

Quoi qu’il en soit, c’est quand vous voudrez que je retournerai volontiers me faire voir…chez les Grecs !

lundi 11 mai 2009

Chronique d'un valorisateur: Le privilège cordelette

Quand on est valorisateur, on a parfois l’occasion de dépasser les frontières. C’est ainsi que Prague me tendait les bras avec un fabuleux colloque européen. On m’a expliqué que je logerais dans un bel hôtel mais pas trop, que je devrais porter une cravate, parler en anglais et assister à des ateliers très sérieux. En échange, je pourrais découvrir la ville dorée, manger local et boire de la bière même si je n’aime pas ça. Brussels Aireline prévenu de mon business travel, me voilà parti…

Valorisateur, c’est vraiment chouette. Quand on arrive à l’aéroport,
il y a monsieur qui attend, une grande pancarte à la main avec votre nom en majuscule. Il vous accueille en disant des choses en tchèque et comme vous êtes poli, vous souriez en disant « ok ! » (car en tchèque, « c’est pas faux » ne marche pas). Vous comprenez plus tard qu’il vous expliquait ne pas accepter les cartes de crédit. Aë ! (En tchèque : Aïski !). Un moment de solitude est néanmoins vite passé. Mais la véritable histoire du valorisateur commence le lendemain matin, au Palais des Congrès !

Le grand hall, c’est comme un aéroport mais en plus chic. Des tas de gens super bien sapés arrivent devant des flics tchèques (qui sont moins raides que les allemands mais quand même plus sérieux que les italiens) qui semblent vouloir leur demander quelque chose. Il faut savo
ir que cette langue de l’Est, bien que très charmante, fait de drôle de groulis dans les tympans. Au regard du policier, j’ai vu deux possibilités de traduction : « Veuillez déposer vos objets métalliques dans le bac » ou « Vous prendrez bien une salade au chèvre et un verre de Merlot ? ». Apparemment, je ne suis pas très bon en tchèque… mais j’ai néanmoins choisi la bonne solution.

A l’accueil, tout le monde se presse pour l’avoir. Elle est là, au bout de quelques mètres, d’un sourire, d’un éch
ange de mot de passe codé en 3 alphabets, de la présentation d’un passeport, d’un permis de conduire, d’un certificat de bonne vie et mœurs et d’une lettre signée par le roi. Elle est là, la cordelette ! Ce petit objet magique et coloré qu’on vous glisse autour du cou vous transforme instantanément en personne très importante. La mienne était orange fluo, ce qui signifiait que j’avais beaucoup de privilèges mais pas celui de monter sur les estrades ni de boire du champagne entre les repas. Au bout de la cordelette, un badge nominatif dont, il faut bien le dire, tout le monde se fout éperdument.

Cordelette au cou, donc, on voyage dans les allées du Palais. Plein de gens se baladent en souriant, et se serrent la main (voire chronique d’un valorisateur, la technique fricadelle). Bien sûr, Europe oblige, on doit parler anglais. Quand on m’a demandé « where is the waters ? » j’ai pointé les toilettes d’un geste assuré. L’homme (dont j’apprendrai plus tard qu’il s’appelle Michel Popov et vient de Lyon) reprend en
me disant : « No, waters glouglou ! ». J’avoue, j’ai ri. Merci Popov. Ceci dit, la plupart des orateurs s’en tirent très bien…ah ! Les orateurs !

Il faut savoir que l’Europe c’est sérieux. Très sérieux même ! On parle de programme cadre, d’innovation sociale, de région de la connaissance et même de crise financière. Moi, je pensais qu’avec des mots comme ça, ils pouvaient se la péter à la hauteur de l’investissement européen. Mais non, pour que ça ait l’air suffisamment grave, il faut que la séance soit ennuyeuse à mourir. Présentation monotone, discours barbants, ton de voix monocorde, immobilité, visage sentencieux. Heureusement que M. Kim-Choo est venu de Singapour pour animer un atelier communication à la manière d’une séance d’arts martiaux, avec cris de ponctuation, amples gestes exemplatifs et éclats de rire flamboyants. Ceci dit, je n’ai pas perdu ma bonne humeur face aux autres endeuillés du colloque dont les cordelettes oranges, bleues et roses fluo parvenaient à entamer quelque peu le sinistre de leurs trois pièces.

La cordelette donne aussi droit à un repas. Bien sûr, un walking dinner avec beaucoup de vin et beaucoup de gens qui vous marchent sur les pieds et vous bousculent pour se précipiter vers le buffet, comme s’ils avaient attendu un bout de brie toute leur vie. Avec la cordelette, on peut aussi avoir du café, des autocollants, des CD-ROM et un tas de brochures qu’on ne lira jamais. Dès lors, heureux de toute cette reconnaissance, on se promène à la découverte de contrées inexplorées, d’accents de l’Est savoureux, de jolies hôtesses en chemisiers blancs qui vous lèguent des sourires et vous offrent des tartelettes au pavot.

Par contre, la cordelette à ses limites ! Elle ne vous donne
pas droit au métro gratuit, ne vous donne pas la priorité aux caisses des supermarchés et ne vous permet pas d’entrer gratuitement dans les musées. Elle ne vous fait pas mieux comprendre le tchèque et ne vous offre aucune réduction à l’achat d’un MacGoulash menu au McDo. Malgré ces faiblesses, la cordelette vous donne quand même un incomparable charisme.

Mais la véritable grande classe, c’est d’apparaître en photo dans le journal officiel du colloque, publié au lendemain du lancement de l’évènement à 5000 exemplaires. Le visage emprunt d’un subtil mélange d’intérêt, d’il
lumination, de sérieux et d’ennui, j’ai compris que cette enivrante notoriété photographique m’avait été offerte par cet objet de style qui offre au cliché son contraste particulier et rappellera le curieux élitisme de la manifestation. C’est le privilège de la cordelette…


PS : Et pour ceux qui auraient suivi l’article précédent, je tiens à préciser que j’ai eu un bic !

lundi 27 avril 2009

Chronique d’un valorisateur : l'hégémonie du bic

De part les âges et jusqu’à aujourd’hui, toutes les professions ont eu leur objet fétiche, symbole de leur savoir, reluisant de leur fierté. La clé à molette du plombier, le stéthoscope du médecin, le ciseau à bois de l’ébéniste, le maillet du juge prononçant la sentence. Le valorisateur ne fait pas exception à la règle. On ne le sait que trop peu et pourtant, un utilitaire de première nécessité fait la loi dans notre giron professionnel, ci-dénommé : le bic!

J’assistais à mon 96ème évènement coloco-sémino-formatif, assidu et concentré du début à la fin, comme le veut la tradition. Je hochais la tête à intervalle régulier, je fronçais parfois les sourcils en signe de doute et je levais de temps à autre les yeux au plafond comme pour mieux réfléchir…à la composition du buffet déjeuner. J’ai même utilisé un «c’est pas faux!» dont j’étais particulièrement fier et qui a rendu très jaloux mon voisin de table. Les orateurs enfin épuisés, les thermos vidés et le jus d’orange tiédi, il était temps de clôturer la session. Je rassemble alors mes affaires, enfile ma veste et craque les doigts en vue des poignées de mains à venir. C’est là qu’un des organisateurs me hèle sévèrement. Il a le bras tendu vers moi, son poing serré sur l’outil. D’articuler alors : «Voyons, monsieur! Votre bic!». Je découvrais, ébahi, l’hégémonie du bic…

Force me fut donc d’admettre que j’aurais profondément vexé mon hôte si j’avais laissé sur la table le précieux stylo à bille estampillé de la marque des organisateurs. J’imaginais soudain les comités d’organisation des nombreux évènements auxquels j’ai assisté. Je voyais cette personne à l’œil vif, au visage grave, attendre le point essentiel à l’ordre du jour : «Quid des bics?». Car dans ce monde de contrats et d’articles, de groupes de travail et de formations, de projets européens et de doctorants, le bic est le primordial, le liant, l’obligation fondamentale. Un séminaire sans bic, c’est comme une pizza sans fromage, un Laurel sans Hardy, un pile sans face, une soirée de mariage sans la compagnie créole. Bref, une totale hérésie. Qu’importe la forme ou la couleur, il faut se démarquer, être fier et pompeux et placer entre deux gorgées d’arabica : «T’as vu les bics qu’on a fait faire? Pas mal, hien?»

Bizarrement, l’hégémonie du bic s’instaure d’autant mieux chez les acronymistes chevronnés. On voit ainsi se succéder sur le métal luisant ou le plastique fragile des AST, des ASE, des RW ou des LIEU, CURIE, FEDER, FSE, ASTP, FNRS et même AVRE, SVR et autre EU ou FP7. Ma collection personnelle rassemblée, je me trouve en possession d’une version originale et méconnue du Scrabble ou chaque bic peut potentiellement rapporter un maximum de point. Mais au-delà de cet aspect ludique qui semble n’amuser que moi, les participants se prennent au jeu. Dès la première pause café, on les voit tester la résistance de l’objet. Ils l’observent sous toutes ses coutures, l’essayent des deux mains (même s’ils ne sont pas ambidextres). Un petit croquis dans la marge pour tester la couleur, la finesse, le «glissé» sur le papier. Ensuite, quelques «clics!» d’usage pour tester la mécanique. Enfin, le test ultime, celui de la barrette. Oui, cette barrette sans nom qui permettra d’accrocher le bic à son bloc-notes ou à la poche de sa veste et qui finira, on le sait tous, par voler en éclat tôt ou tard sous le son d’un «ho non!» désappointé.

Le bic nourrit également des mystères insondables qui savent néanmoins se faire discrets. Le bic ne meurt jamais vraiment. Il disparaît. Il devient léthargique du délaissement, coince sa bille, se sèche l’encre. La vacuité de son être le condamne trop souvent à l’abandon. L’objet se glisse partout, se perd et parfois se retrouve. Il se prête, souvent sans retour. Il se donne parfois, s’offre souvent. Il finit toujours par disparaître dans de mystérieuses circonstances. A quand la dernière fois où vous avez jeté un bic? Ah! Ne cherchez pas! L’acte est bien rare et pour cause… le bic a son parcours de vie, mystique et indescriptible. De main en main, il jongle des écritures dont il se trouve possédé, se déplace d’un tiroir à un autre, d’une poche à un bureau, et inévitablement, il finit dans l’éther indicible et emporte même son souvenir avec lui.

Ce matin, j’étais en réunion au FNRS. Je repensais à cette hégémonie du bic distraitement quand soudain, j’entendis mon voisin appeler l’organisatrice. Elle accourut vers lui, tout sourire, prête à lui rendre tous les services. Il brandit le bloc-notes estampillé des quatre lettres en demandant : «vous n’avez pas de bic?». La blonde arbora soudain une incommodante déconfiture et dans une gêne perceptible, se vit répondre : «Heu…non, non on n’en a pas prévu.» L’homme marqua un silence avant de lancer un «Ha..bon, ce n’est rien…» qui appuya sa déception plus encore que sa déconvenue. Il saisit alors un bic dans son veston, gribouilla sur le coin supérieur droit pour en vérifier le fonctionnement et se mit à lire les lettres «NCP», retrouvant alors une mine réjouie. Il m’a alors confié un regard attendrissant, indiquant le bic et lâchant : «Tant pis!».

Ma réflexion se termina dans le train, au voyage du retour et confirma ma dévotion au sacro-saint stylo bille. C’était au moment où ce jeune garçon sorti son Go Pass, me fixa et me demanda : «Dites, monsieur, vous n’auriez pas…un bic?»


dimanche 12 avril 2009

Pauvre Arnaud...

Je prends un petit moment pour oublier les crises existentielles et m'en reviens à la légèreté d'un petit article bien comme il le faut. Ce sera très court (mais très bon!).

Ainsi, je souhaite dénoncer par la présente le comportement outrageux de certaines filles, en soirée, qui dragouillent de pauvres petits Arnaud(s?) pour ensuite les laisser choir (!) lamentablement...

Ce matin, au lever, je reçois donc ce sms, retranscrit tel qu'il m'est arrivé:

"Salut la plus jolie de la soiréee j espère que je ne vais pas te réveiller moi j suis au boulot et g pas assez dormi 1h c était pas assez-je voulais juste te dire que j aimerais faite ta connaissance autre part qu en soirée au moins maintenant tu as mon num si ça t intéresse tu m'écris quand tu veux en espérant avoir une réponse prochainement j t souhaite une bonne journée à bientôt j espère arnaud"

Déjà, mes neurones s'affolent à imaginer la situation. En tout cas, j'ai bien compris une chose: Arnaud espère. Et il espère fort. Très fort. Arnaud travaille le dimanche de Pâques. Est-il déguisé en lapin ou en poule sur un parking de Cora? Est-il vêtu de son uniforme de flic pour surveiller le tournoi de pétanque de Hornu? Est-il boucher au Spar de Wiers, ouvert les dimanches, même fériés, de 10h à 12h30?

Mesdemoiselles, même si je suis ravi d'être la plus jolie de la soirée, faites-moi plaisir: quand vous donnez un faut numéro à quelqu'un, évitez que ce soit le mien...

Maintenant, une question mi-ange mi-démon me turlupine le ciboulot: que faire de ce message? Car si toutes les dérives sont possibles, je me demande encore laquelle choisir... des propositions...? (Gnark! Gnark! Gnark!)

lundi 6 avril 2009

Cri du cœur !

On traîne, on souffle, on soupire. On lève la tête au ciel et on demande : « pourquoi ? Mais pourquoi ? ». On baisse les yeux, on marche plus vite pour sentir le vent, pour sentir la vie. On traverse au rouge, on marche au bord des trottoirs. Parfois, on s’arrête, quelques instants. Des pensées s’entremêlent, s’effondrent et disparaissent. On souffle. On soupire.

Moi je veux plus. Plus loin, plus haut. Je veux plus, plus fort, plus grand. Je veux vibrer de long en large, me sentir exploser comme un oreiller, me voir éparpillé en millier de plumes, blanches et légères. Je veux m’évanouir en poussière d’étoiles, parcourir l’univers, me brûler des soleils et m’endormir sur la lune. Moi je veux plus. Bondir très haut, toujours plus haut. Quitter la terre et toucher les nuages, chatouiller les anges par les orteils et me moquer des albatros. Je veux courir, vite, très vite. Je veux dépasser les voitures sous les regards atterrés des conducteurs. Encore plus vite, traverser les frontières et voir le monde se ralentir, s’arrêter bientôt. Je veux sentir mon corps se fondre dans la lumière et avec elle, m’évaporer dans l’éther. Moi je veux plus, plus fort. Mes phalanges sur le piano, le bois qui éclate. Je veux jouer toutes les mélodies et que les mélodies se jouent de moi. Je veux m’enrober de croches et de dièses, être une cantate ou une nocturne, une sonate ou un prélude.

Et pendant ce temps, sur le bitume, on entend les pas des inconnus qui grattent le présent pour un morceau de futur, une bribe de passé. On subit l’aujourd’hui pour moins penser au demain. On veut le bonheur mais on en a peur. On se cherche, on se trouve parfois. Mais sans résultat. On traîne les pieds d’un crépuscule à l’autre, on se vide, on se conforte. Confort de ceci, confort de cela. On s’enrobe d’aventures indésirables, on piétine, on râle, on klaxonne. Comme on peut, on y met de la musique et des sons et l’on oublie. On s’oublie. Pour préserver, pour rester bon et humble. Pour aller au paradis, peut-être. On oublie. On s’oublie.

Mais je veux plus. Je veux parcourir le monde en marchant sur les mains. Et si l’on me demande pourquoi, juste répondre : « comme ça… ! ». Je veux voir le bleu des mers, l’ocre des déserts. Je veux courir dans les rues de New-York, la pluie massacrante, le Times sur la tête. Je veux gravir l’Himalaya, souffler de bonheur en touchant le sommet et m’écrier : « et c’est tout ? ». Je veux me réveiller dans un champ de coquelicot, respirer le matin, rêver du champ prochain. Plus haut, plus loin. Pleurer mille océans, n’en regretter aucun. Dériver, chavirer, me relever. Je veux des tsunamis et des tremblements de terre. Plus fort, encore. Que mon cœur s’emballe et chamade, que mon corps tressaille et se perde, que mon esprit s’embrume et mes yeux pétillent.

J’ai décroché les pieds de l’asphalte, débranché mon réveil et catapulté mon portable. Et j’ai crié du cœur, cette envie de plus haut, de plus fort. Et de surprise, et d’imprévu. Et de partage, et d’inconnu. Et de rencontres, et d’impromptu. J’ai laissé tomber les règles et les lois, laissé derrière ce qui me fissure. Et j’ai crié du cœur comme on crie d’un naufrage, aux vagues et aux cieux. Car il faut parfois savoir s’élancer, confiant du vide, comme un nuage de plumes, comme un parfum de mai, comme un vague à l’âme. Il faut parfois pouvoir se dire nos larmes. Il faut parfois fermer les yeux, fermer très fort, et regarder ensuite le ciel pour y apercevoir sa bulle d’espoir.

Serait-il grand temps de rallumer les étoiles ?

jeudi 26 mars 2009

L’histoire des bulles de rêve

Un moment magique, comme le temps qui s‘arrête pendant quelques instants. L’élégance insondable de l’innocence. Le bleu translucide d’un regard plein de rêves. Quelle chance inespérée que celle de croiser la route d’un rêveur. Pas un rêveur d’opérette à l’allure déchirée ! Un véritable danseur de lune qui porte en lui l’étincelle éphémère de cette foi en l’absolu…

Un rayon de soleil dans une journée grise. Je marche, soucieux de tout, et soudain sur un carré d’herbe déjà verte, un petit garçon, 5 ou 6 ans à peine. Il sert dans les mains un cylindre de plastique coloré duquel il tire l’élixir magique, créateur de bulles de savon. Inconsciemment, je ralentis ma route. Je remarque sa maman assise sur un banc, quelques mètres plus loin, le sourire aux lèvres. Je ralentis encore pour mieux l’observer…

Le petit homme souffle avec délicatesse et regarde quelques bulles s’envoler. Mais bien vite, il ferme les yeux, comme pour se concentrer. Il plisse le front, sert les poings. Quelques secondes. Puis, il regarde le ciel, émerveillé, heureux. Je souris de plus belle en le fixant malgré moi. Soudain, il croise mon regard. Il m’interpelle et je ne résiste pas à m’arrêter.

-T’as vu monsieur ? Elles sont belles mes bulles !
-Ah ça oui, drôlement belles.


Comme pour mieux prouver son affirmation, il lance quelques bulles dans l’air et ferme de nouveau les yeux. Quand il les rouvre, il tourne la tête vers moi, comme contrarié.


-Mais t’as pas fermé les yeux !

-Ah ben non, sinon je ne vois pas les bulles.

Et là, de m’expliquer :

-Ah non ! Tu peux les regarder vite mais après tu dois fermer les yeux. Sinon, la bulle elle éclate !

-Ah ? Et si on ferme les yeux ?
-Alors la bulle, elle peut s’envoler tout en haut dans le ciel et puis elle n’éclate jamais. Et si tu regardes bien tout là haut, tu verras les bulles des gens.

Mon petit cœur s’est serré d’attendrissement. Il m’expliquait sa technique avec force et sagesse. Je ne savais pas quoi dire devant si belle réflexion. Le bonhomme s’est approché de moi, prêt pour une démonstration. «Regarde monsieur!», prononce-t-il en soufflant avec douceur au travers du cercle coloré
. «Tu vois, si on les regarde, pouf, elles meurent!». Je plie les genoux pour être à sa hauteur et remarque le petit rire de sa maman, amusée. « Maintenant, tu vas fermer les yeux avec moi, d’accord ? ». Je me prends au jeu et à peine a-t-il donné naissance aux sphères luisantes, je ferme les yeux, plein d’étoiles dans la tête, jusqu’à l’entendre me dire : «Regarde!». Les yeux au ciel, il me pointe les nuages en s’exclamant : «Elles sont là-bas! Elles sont là-bas!». J’ai jeté mon regard vers là-haut et ne me suis jamais senti aussi proche des bulles de rêve.

Alors que je me relevais, il me dit : «Tu sais monsieur, un jour, j’expliquerai aux bulles qu’elles ne doivent pas avoir peur et qu’elles peuvent rester avec nous et on pourra les regarder voler pour tout le temps». J’ai ébouriffé ses cheveux de ma main. Mes yeux étaient brillants de ces quelques secondes insensées. J’ai lancé, en m’éloignant, un timide «merci bonhomme !». Et lui de me répondre en haussant les épaules, comme d’une évidence singulière : «Ben de rien, monsieur!».

J’ai rencontré un rêveur. Un vrai. Et maintenant je sais comment faire vivre les bulles de savon «pour tout le temps».


La vie est belle, qu’on se le dise...

mardi 24 mars 2009

Monsieur! … oui?

Une belle fin d’après-midi, dans une administration dont on ne citera pas le nom. Un jeune homme (moi), éreinté d’une journée folle, assis face à un fonctionnaire. Sur le bureau du fonctionnaire, un formulaire (le XB-347 bis, pardi !). Le but de la rencontre : remplir ce formulaire !

Deux cases. La première : « Monsieur ….. (nom et prénom) ; Date de naissance :…. ; Lieu de naissance : …… ; salaire mensuel net : ….. ». Jusque là, tout va bien. Le bonhomme s’affaire à retranscrire les informations avec un zèle tout particulier. Il est bientôt 17h, faudrait pas charrier, non plus ! Et vient la seconde case : « Madame ….. (nom et prénom) ; Date de naissance :…. ; Lieu de naissance : …… ; salaire mensuel net : ….. ». Quoi d’affolant, me direz-vous ? Simplement que quand un monsieur vit avec un autre monsieur, il est bien obligé de réclamer quelques modification subtiles aux formulaires standardisés.

Lui de prononcer : « Ensuite… Madame… ? »
Moi de répondre : « Heu…non…Monsieur ! »
Lui, de lever la tête en me regardant et d’entonner gaiement ( !) : « Oui ? »



Moi, de reprendre avec insistance : « Je disais : Monsieur ! »
Lui, de s’exprimer avec un sourire niais : « Moi c’est Stéphane. »



Moi, de lui pointer du doigt la case incriminée en développant davantage : « Pas Madame, Monsieur ».

Quelques secondes de réflexion (cfr la musique des chiffres et des lettres…tu tululutu tu tululu), compréhension, illumination, réception sur un pied et demi : « Ah oui ! Oui, mais oui. Mais heu oui ! Pas de problème. Heu oui… donc bon ben…Monsieur… ? »

J’ai confié à Stéphane un sourire attendri devant autant d’innocence et de naïveté. Cet interlude adorable aura bien clôturé ma journée.

dimanche 22 mars 2009

L’ironie des cendres

La vie a parfois un humour étrangement dérangeant. Avant de vous raconter cette histoire, je désire prévenir les âmes sensibles que ce récit fait preuve d’un certain humour noir, voire, d’un humour noir certain…

Dimanche dernier, notre amie Sophie jouait enfin devant un public, un vrai, avec des gens, cette fameuse pièce de théâtre intitulée « Tout bascule » et sans laquelle l’homme blague ne serait pas sorti de l’anonymat. Le pitch ? Un directeur de publicité apprend que sa maîtresse est décédée et que son meilleur client le quitte, le jour même de son mariage pas très sincère avec sa femme enceinte. Quand on sait que la maîtresse en question n’est que faussement morte et qu’elle envoi son frère, une urne funéraire à la main, pour se jouer de l’époux malhonnête, l’histoire prend un tournant définitivement drôle.

Seulement voilà, cette histoire d’urne prend une dimension drolesque relativement importante. Les cendres s’éparpillent et finissent aspirées dans un Braun Turbo 3000 puis dispersées sur le lit du marié à la demande expresse de la fausse-défunte. Imaginant les calambours adorables entre les cendres, la sandre du buffet et les marches à descendre, vous imaginerez sans peine le leitmotiv du premier acte de la pièce.

Mais voilà, dans la salle, il y a Maurice (Oui, je l’appellerai Maurice !). Dès le début de la pièce, après quelques rebondissements à peine, il court en pleures vers le bar où, attablé, il affiche sa mine déconfite et ses larmes d’alligator. Un jeune homme vient lui tenir compagnie, la main sur l’épaule, la mine transie. Derrière le bar, il y a Régis (qui s’appelle vraiment Régis), mi-surpris, mi-inquiet, mi-décontenancé (Régis est un homme très complet). On lui a pourtant dit que la pièce était drôle, ce qu’il avait cru jusqu’ici. Le jeune homme quitte Maurice quelques instants, devant le regard interrogateur de Régis, et s’approche, manifestement ennuyé. Régis de demander :
- Tout va bien monsieur ?
- Heu…c’est parce que sa femme est décédée il y a 2 semaines…et…elle a été…incinérée…
- Ho…

Face à la rocambolesque situation, Régis a du mal à retenir un petit pouffement nerveux dans la lignée du « c’est quand même pas de bol ». Il hausse les épaules et crispe les lèvres : « Ah c’est balot ! ». Le jeune homme, contrit, porte un regard désolé à son ami.

Soudain, comme si l’incongru ne suffisait pas, on entend la voix d’un homme dire à sa petite fille : « Vite, vite, va dans la salle, Chantal va entrer en scène ! ». Phrase anodine qui, contre toute attente, provoque un nouveau torrent de larmes encore plus spongieux (y voir de gros « snif ! » tremblotant). Régis arrête d’essuyer ses verres et lance, de nouveau, un regard interrogateur à son interlocuteur qui, un peu gêné, se voit obligé de chuchoter, un peu crispé : « Ben oui, elle…elle s’appelait Chantal… ».

L’histoire ne dit pas si Régis à plongé la tête dans le frigo, entre les sandwiches au jambon et la tarte au sucre, pour y soupirer toute l’ironie des cendres de ce pauvre bougre.
Comme quoi, il n’est pas rare que parfois, tout bascule…




jeudi 5 mars 2009

Chronique d’un valorisateur : la technique fricadelle.

Lorsque dans une conversation, le sujet de la profession est abordé, je me mets à trembloter. De la sueur perle sur mes tempes et mes doigts se crispent. Lorsque la question fatidique tombe, je serre les lèvres et me mets à penser à toute vitesse. « C’est quoi ton métier ? ». Force est d’admettre que je suis contraint par l’unique réponse : Valorisateur.

Quand on est valorisateur, on comprend vite qu’il serait plus simple d’être plombier, avocat, comptable ou encore laveur de vitre ou même consultant (oui, même consultant !). Car lorsque le mot est prononcé, on a droit à un sourire dubitatif et à une moue serrée. Le tout entre le « j’aimerais bien savoir ce que c’est » et le « merde, j’ai pas posé une bonne question, il va m’expliquer, me raconter des trucs chiants et je vais devoir faire semblant d’avoir compris ». Même Word me crache ses ondelettes rouges quand j’utilise le terme !

Valorisateur, ce n’est pas un héro de Comic Books. « Super Valorisateur, vole au secours des brevets perdus et des scientifiques en déprime ! ». Non. Valorisateur, ce n’est pas non plus une insulte : « Va te faire *biiiip* sale valorisateur, va ! ». Valorisateur c’est un métier, un vrai, avec des horaires, et des trucs à faire et un salaire à la fin du mois.

Le valorisateur, il est l’interface (outch !) entre les chercheurs et les industriels, au sein d’une université. Il essaye de faire comprendre aux scientifiques qu’il vaut mieux dire « sel » que « magnésium sulfaté » et aux industriels que « chercher, c’est parfois aussi trouver ». Le valorisateur va voir des gens très importants à la Région Wallonne dont personne n’a jamais entendu parler. Mais le valorisateur, il va aussi à des colloques internationaux…

Un colloque international, c’est facile. Vous prenez un lieu pas trop pourri dans une grande ville (genre, le foyer culturel de Péruwelz, on oublie) et vous annoncez un an à l’avance l’immensité de l’évènement. Vous créez une page web où aucun programme n’est disponible, aucune adresse et aucun horaire et vous demandez 500eur par personne pour l’inscription. Facile !

Le jour J (éventuellement reporté 4 fois), vous placez plein de gens super bien habillés au milieu de tables rondes et hautes. Il faut dès lors boire du café ou du thé, prendre un petit Spéculoos et saluer les gens que vous croisez comme si vous les connaissiez de longue date en lâchant des « bonjour, ça va ? », « ca fait longtemps, hein ! », « quel plaisir de vous revoir ». Ensuite, on se rassemble dans des salles avec des vidéoprojecteurs et des PC portables. On appelle ça des ateliers (même si on n’y sculpte pas de bois). On écoute alors des gens parler de choses totalement inintéressantes qui utilisent des expressions comme « polysémie caractérielle », « ingénierie collaborative » ou « mutualisation des ressources ». Ils font des sourires et parfois, même, ils plissent les yeux et serrent le front comme pour mieux marquer la gravité de la situation. Dans la salle, les auditeurs se tiennent le menton en hochant la tête, aiguisant le célèbre et efficace : « ce n’est pas faux ! ».

Le meilleur moment, c’est le repas. Il faut l’appeler « walking dinner » et préparer des sandwiches avec du foie gras, du saumon fumé et du brie, sans oublier la feuille de salade. Il faut mettre à table des bouteilles de vins et des serviettes microscopiques. Les gens super bien habillés se rassemblent alors pour manger les sandwiches avec difficulté et articuler entre deux bouchées que « l’emprise sociale sur la démocratisation du management collaboratif est une abomination psycho-éthique ». Personnellement, moi, ça m’impressionne. Une fois le buffet vidé, les organisateurs se rendent compte que l’on est 1h15 en retard sur l’horaire et reprennent les réjouissances avec les tables rondes. La table ronde, c’est une activité ou des personnes qui savent beaucoup de choses sur presque rien se rassemblent (généralement autour de tables rectangulaires… ?!) pour faire semblant de discuter pendant qu’ils digèrent (gère !).

Le colloque se termine alors par une session de clôture, où tout le monde se frotte le ventre de satisfaction. Le travail accompli est d’ampleur, le partage fructueux. Il a été décidé que nous réfléchirons aux problématiques évoquées et que nous trouverons des solutions. Voilà un programme conclusif très pertinent.

Les gens bien habillés se saluent alors (« oui, grosse baise, hein ! »), éreintés de leur journée. Et chacun sait très bien que cette journée n’aura été qu’une symphonie vide et plate. Chacun sait que le plus important fut quand même le lunch. Chacun sait qu’il n’a rien compris de ces présentations et rien retenu des tables rondes. Chacun sait que ce colloque n’était en fait qu’un jeu de plus pour « réseauter » et balancer sa dernière cravate Tiny Toons au public, manger du saumon, boire du Sauternes et demeurer loin des coups de téléphone du bureau.

Dany Boon sera encore une fois mon maître spirituel. Car ce qu’il y a dans le colloque international du valorisateur, c’est un peu comme ce qu’il y a dans la fricadelle : tout le monde le sait, personne ne le dit…

samedi 28 février 2009

L’homme-blague

Le rire est un moteur de vie, comme une pilule magique qui vous procure instantanément du bonheur à forte dose. Dans la série « c’est pas bien de se moquer mais on le fait quand même », je me suis promis de vous raconter l’histoire de l’homme-blague…

Contexte : une charmante amie que nous appellerons Sophie (puisque c’est son prénom) vient quérir mes services pour la conception d’une affiche de 1.20m sur 2.20m qui servira au décor d’une pièce de théâtre. L’histoire devient intéressante au moment où l'on sait que Reynald doit recevoir le fichier pour imprimer l’image. Reynald, c’est l’homme-blague.

Après moult aventures pour faire parvenir à notre homme-blague le CD contenant le fichier, je reçois un petit message, comme un SOS, comme une bouteille à la mer :

« John, c’est Sophie. Voici le numéro du gars qui doit imprimer l’affiche, il a demandé que tu l’appelles. Fais-le au plus vite ! Merci ! 0478/**.**.** »

Pris de panique face à cette alerte et connaissant l’urgence de la situation, je me décide à appeler Reynald, que je ne connais ni de Laurel, ni de Hardy, afin de prendre connaissance du problème.

« Tûûûûût… » (ça sonne…)

- Allô ?
- Oui, bonjour, Jonathan à l’appareil, l’ami de Sophie qui a fait l’affiche pour le théâtre
- Han !

Imaginez de préférence l’accent de Mouscron/Estaimpuis. Si vous ne le connaissez pas, imaginez n’importe quel accent belge, l’homme-blague fonctionne avec une large gamme de tonalités !

- On m’a demandé de vous appeler donc voilà…
- Han ouais…
- [blanc]

Je suis pris d’un doute profond et glacial mais j’articule néanmoins :

- Quel est donc le problème ?
- Ho ben y a pô de problème, hein ! Ca va, ca va.
- …

Etonné, je suppute (mais que ce mot est vulgaire !) une erreur de communication et m’apprête à prendre congé de Reynald. Cependant, en guise d’au revoir, j’entends :

- Ouais. Ah ! En fait, j’ai un CD, lô ! Avec une affiche. Ben j’arrive pô à l’ouvrir, hein ! Ca na vô pô !
- … hu hu… Peut-être que c’est pour ça qu’on m’a demandé de vous appeler ?
- Ho, je sais pô, moi. C’est possible…

Je suis pris d’une convulsion cervicale et d’une tension de l’œil. Tout va bien. Respirons. Je demande alors à l’homme-blague quel est le problème. Il m’explique donc que : « Le fichier ne s’ouff’ pô ». Moi, de lui demander : « Mais quel est le message d’erreur ? ». A ces mots, l’homme-blague ne se sent pas de joie, et pour montre sa bonne foi, s’encourt vers sa voiture sans mot, ni voix. Une succession de bruits de porte, d’escalier, de rue, de portière nous amènent au cri victorieux :

- ‘a y est ! J’ai le cédéée, hein !
- … fort bien, mais… (Que dire ? Mais je vous le demande, que dire ?)le message d’erreur, c’est quoi ?
- A mais ça je ne sais pô, moi, y n’a rien d’écrit su’l cédéée !

Je reste pantois (ma française de collègue dirait : je reste plan-plan…) et me contente d’un simple « ok », déjà effrayé par la suite des évènements. Je propose donc de lui envoyer un format plus standard, histoire de simplifier au maximum la tâche du Reynald. Au final, de lui demander :

- Je pourrais peut-être vous l’envoyer par e-mail, ce serait plus rapide ?
- Ah oui mais moi j’ai pô d’e-mail, hein !
- Vous n’avez pas d’e-mail ??
- Ha nan. Nan, nan.

Je conçois que même en 2009, même en possédant un PC et même en étant un homme-blague, on ne possède pas forcément d’adresse électronique. Prêt à lui proposer un envoi standardisé via CD avec mode d’emploi sur comment le sortir de l’enveloppe et le placer dans le lecteur, je me laisse entendre :

- Par contre, j’ai une adresse MSN ! Han Han !
- …

Et voilà comment s’est terminé le coup de fil de la semaine avec Reynald, l’homme qui ne sait pas pourquoi je l’appelle, l’homme qui lit les erreurs de fichier à même le CD, l’homme qui n’a pas d’adresse e-mail mais quand même une adresse MSN…

Et de penser à Dany Boon qui disait si bien que « la twingo, c’est pas une voiture, c’est une blague ! », j’ai conclu après avoir raccroché que Reynald était le premier homme-blague que j’entendais. Et il m’est presque (je dis bien « presque ») venu l’envie de le rencontrer afin de toucher du regard un bout de cette fantastique réalité.

vendredi 27 février 2009

La tortue qui voulait devenir artiste...

Il y a parfois des ambitions que l’on ne peut ni comprendre, ni imaginer. Des envies qui dépassent l’imaginable et s’envolent vers les frontières de l’insoluble pour finir par se déposer sur un tapis d’accompli. Ca étonne. Ca surprend. Ca attendrit. Bref, ça fait rêver.

Il y a neuf mois de ça, arrivaient dans notre logis deux compagnes aquatiques écaillées de la tête aux pattes : Caroline et Martin. Les tortues, rapidement renommées « les tounes », ponctuent notre quotidien de petits coups de carapace, de bâillements intempestifs, de cache-cache dans les galets et de dos crawlé en maillot et bonnet réglementaires.

Si Martin a toujours fait preuve d’une timidité naturelle et d’une anxiété latente, Caroline, elle, s’est toujours montrée aventurière et franche. Elle n’hésite pas à sortir le cou hors de l’eau pour mâchouiller sa crevette directement du fournisseur ou à frapper le carreau de sa petite patte de toune quand elle est en colère (Martin lui porte parfois un peu sur les nerfs !). Mais le cœur aventureux de notre reptile carapacée portait plus d’envies que nous le pensions.

Ce matin, les yeux brumeux d’une longue nuit de plomb, je salue comme à l’habitude les deux habitantes de l’aquarium. Enfin non…pas comme d’habitude, puisque je n’en salue qu’une seule ! Fichtre ! J’ai beau fouiller l’aquarium de fond en comble (ce qui fut fait rapidement, disons-le !), rien. Caroline avait disparu…

Mais comment une tortue d’eau peut-elle disparaitre, comme ça, sans laisser de trace ?

Les scénarios (ou scénarii, on peut dire les deux) les plus fous ont parcouru mon esprit. Caroline avait échafaudé son plan depuis la dernière épuration d’eau de l’aquarium. Elle savait que le niveau serait plus haut, qu’elle pourrait grimper sur la pompe, passer au-dessus de l’aquarium et descendre en rappel le long du câble électrique. Elle avait alors prévu de se confectionner un parachute au moyen de mouchoirs en papier, de ficelle alimentaire et de scotch (Caroline TouneGyver) pour atterrir en douceur sur le carrelage et partir à l’aventure…mais à l’aventure de quoi ?

Après 20min de recherches infructueuses, nous avons émis l’hypothèse qu’elle pouvait avoir été mangée par Martin, enlevée par des extratortuterrestres ou encore qu’elle avait pris les clés de la voiture et s’en était allée à Paris où elle espérait faire carrière dans le modern Jazz. Nos larmes déjà aux creux des yeux, une illumination: la boîte à partition…

Caroline était là, le nez entre la clé de sol et le fa dièse. Elle avait bravé tous les dangers jusqu’au piano. L’âme musicienne, elle avait voulu, à son tour, pianoter quelques mélodies et laisser s’exprimer son talent. N’ayant pas son kit d’escalade, elle a dû se rendre à l’évidence de cet Everest et aura saupoudré ses restes de rêve sur les doubles croches d’une Sonate au clair de lune.

Rétablie dans ses appartements originels, elle a dévoré un petit repas bien mérité et s’est ensuite laissée porter par la plante artificielle, dans un sommeil réparateur. Le cou dans la carapace, on voyait de petites bulles s’échapper et laisser éclater à la surface les bouts de songe d’une tortue qui voulait devenir artiste